jeudi 29 janvier 2015

LA SHOAH

J’ai du mal. Surtout quand on me gave comme canard en Chalosse.

Ho !! T’es antisémite ? Même pas. Négationniste ? Ben non. Quand ça tombe de partout, qu’on sort les Drucker et que le Président oublie son parapluie, je me dis toujours « y’a un truc », et je me mets à réfléchir. Réfléchir, pas penser. Faut pas confondre.

D’abord, je regarde les mots. « pogrom », ça sent pas trop la langue d’oc. Même pas le français. Et je suis assez d’accord avec Boas : si t’as pas le mot, t’as pas la chose.

L’antisémitisme, j’ai découvert en terminale. Avant, je savais même pas que ça existait. J’en ai déjà parlé. Attention ! Je connaissais les juifs, je savais qu’ils existaient et même que j’avais des copains juifs. C’était rien qu’une étiquette, comme blond, par exemple. Ils allaient à la synagogue, moi à l’église. Pour le reste….. Tiens Fléau, Marcel Suarès, Compagnon de la Libération et saboteur hors-classe. Il portait pas la kippa. Pas utile. Il avait un béret. Les autres aussi, mon père par exemple. La kippa, je l’ai découverte à Paris. J’avais presque 20 ans.

Juste pour dire que le problème n’existait pas. Le prof de philo, il nous a fait lire Sartre. On était ahuris. Il y avait donc une « question » juive. Mon copain Patrick Gomez-Vaez, c’était donc une « question » ? Je l’aimais bien, on était voisins et on partageait une certaine tendance à l’embonpoint et le goût des courses de toros. Rien qui fasse question.

Alors, insidieusement, je me dis qu’on me colle peut être sur le dos un sac trop lourd pour moi. Que la shoah, c’est un truc d’Europe de l’Est, un machin qui a pris naissance entre Moscou et Berlin. Et donc je me sens moins concerné. Tiens, Herzl, il venait d’où ? Et Ben Gourion ? Et Golda Meïr ?

A l’est du Rhin, la haine est ancienne, enracinée, sauvage. Quand l’armée allemande avance en territoire russe, des centaines de types se portent volontaires pour éliminer les Juifs. C’est la fameuse « shoah par balles ». Dans le bas-Adour,la haine a été importée. En 1948, mes copains ne font pas leur alia. Maintenant, on en parle. La saloperie slave existe désormais en Gascogne. Ça, ça me concerne : on m’a pourri mon territoire.

6 millions de morts et t’es pas concerné ? Intellectuellement, oui. Comme je suis concerné par les milliers de morts d’un tsunami. Mais on le sait bien que la mort d’un copain affecte plus que les dizaines de morts d’un crash d’avion en Moldovalachie. Il y a une proximité de l’affect. Au delà d’une certaine distance, on sort du territoire pour entrer dans le concept. Les journalistes le savent bien : ils titrent plus facilement sur la grippe que sur le paludisme.

Au risque de choquer, la shoah est pour moi un concept. Un concept venu d’ailleurs. Un truc qui a un berceau et ce berceau n’est pas chez moi et surtout pas dans ma tête. Je regarde les faits et je me demande si on veut pas m’infliger une punition que je ne mérite pas. Le cimetière juif de Bayonne a été vendu par le curé de la paroisse pour que ses voisins juifs et portugais puissent enterrer décemment leurs morts. On y trouve les ancêtres de Laurent Fabius, des frères Pereire, de René Cassin ou de Pierre Mendès-France. Si c’est pas de l’intégration, c’est quoi ?

En fait, ça fait longtemps que je me pose la question. Et j’aimerais qu’on se demande si le « vivre ensemble » ne se décide pas à deux. Fléau, avec son béret, il me disait : je suis chez moi, comme toi, on est pareils. Le mec qui choisit la kippa, il me dit le contraire, il me marque une différence. Si tu mets en avant ta différence, c’est pas vraiment une envie de « vivre ensemble ». Attention, ça vaut aussi pour le niqab ou la soutane. Ou pour la signalisation routière. Quand tu mets « Lekorne » sur un panneau alors que les cartes portent « Mendionde », t’as un peu envie de paumer l’autre, celui qui ne sait pas.

C’est pas pareil ! Je sais. Les raisons sont autres. Le résultat est le même.

Bon, maintenant, on fait quoi ? A part demander à l’IGN de corriger les cartes ?

On en reparlera….

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