lundi 13 mai 2013

LE SURFEUR ET L’AVALANCHE

Me voilà pris dans un tourbillon sur Facebook. Demago, salaud, insensible, pauvre type, ce sont quelques uns des qualificatifs que l’on m’applique. Rien de moins.

Tout ça parce que j’ai écrit que l’homme (Homo sapiens sapiens) n’est pas un animal marin. Il me semblait pourtant que c’était évident et que, même si je croise régulièrement des baleines sur les trottoirs de Paris, la différence entre une Américaine obèse et un bélouga saute aux yeux.

Du fait de son caractère terrestre, l’homme n’est pas fait pour le milieu maritime. Il faut bien s’y aventurer pourtant, pour pêcher ou pour naviguer, mais c’est alors une obligation et l’accident, fréquent, est accident du travail.

Il est malgré tout des hommes qui considèrent la mer comme un terrain de jeu, un lieu de plaisir. Dans un jeu, tout le monde le sait, seules comptent les règles du jeu. Dans le cas de la mer (ou de la montagne, on y reviendra), c’est le joueur qui fixe les règles en fonction d’un impératif : son plaisir. Son plaisir est de prendre des vagues ou de faire jaillir la poudreuse sous ses skis soigneusement fartés.

Or, mes bons amis, il est un ennemi du plaisir, et c’est la connaissance. Certains hommes ont des milieux hostiles, une vraie connaissance. Le plus souvent, ce sont des locaux, des gens qui vivent toute l’année au contact de ces milieux. Le surfeur ou le skieur hors-piste les considère au mieux comme des domestiques (des guides, des moniteurs), au pire comme des ploucs. Car, si vous regardez les statistiques, les noyés ou les enfouis sous une avalanche, sont le plus souvent des touristes, c’est à dire des gens modernes qui prennent leur savoir dans les prospectus d’un tour-operator et veulent rentabiliser leur mise. Pas question de perdre une heure chèrement payée.

Tout ceci pour dire que le surfeur mangé par un requin me laisse de marbre. Le requin est chez lui, pas le surfeur. Des gens compétents ont informé le surfeur, il n’en a pas tenu compte. Lorsqu’on dispose de tous les éléments et qu’on les dédaigne, on prend une responsabilité. Le jeu devient un vrai jeu, avec un vrai enjeu, le seul qui vaille, la vie. Et parfois, on perd.

Il fallait y penser avant. Phrase idiote. Avant, on ne pense pas. Ou plutôt on pense qu’on sait, qu’on est assez fort, que les emmerdes sont pour les autres. Autant dire qu’on ne pense pas, qu’on ne mène pas une vraie réflexion, qu’on se laisse emporter par le désir. C’est pareil pour les maladies vénériennes. Ou pour le tabac, me souffle mon addictologue favori. Exact.

Et donc, tout le monde cherche à ôter toute responsabilité au pauvre garçon qui laisse une veuve éplorée. C’est pas la faute au surfeur, c’est la faute à l’aquaculture, à l’abattoir, aux écolos, à qui vous voudrez. Au requin, même. Sur la route, c’est la faute à l’alcool pas au mec qui l’a librement ingurgité. Und so weiter…

Ce qui caractérise l’humanité, c’est la responsabilité. C’est pas religieux comme thème, même si on peut y déceler du libre-arbitre. C’est tout simplement une façon de se comporter, d’utiliser les instruments de connaissance pour apprécier les risques d’un comportement, les risques pour soi, les risques pour les autres.

C’est une façon d’être ensemble. La plus difficile parce qu’elle oblige souvent à modérer les envies ou à refréner les désirs. A combattre l’ego. Et c’est vrai qu’on y pense plus en vieillissant. L’expérience….

On en reparlera…..

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