vendredi 23 mars 2012

QUELQUES IDEES LOGIQUES

Méfiez vous : la logique, au jour d’aujourd’hui, est le meilleur moyen de se faire détester, même par vos meilleurs amis. Essayez par exemple d’avoir quelques idées logiques sur ce qu’on appelle « la tuerie de Toulouse ».

Idée n° 1 : si les gosses avaient été dans une école communale laïque et républicaine au lieu d’être dans une école confessionnelle, ils seraient vivants aujourd’hui.

Tu peux la tourner dans tous les sens, elle est imparable. Les gamins, ils sont pas morts d’être juifs, ils sont morts d’avoir été dans une école juive. D’avoir été désignés comme des cibles potentielles. Par leurs parents vu que eux, les gosses, ils ont rien demandé.

Mais, bêlent mes copains, c’est un acte antisémite. Bien entendu. Le ventre est encore fécond….disait Brecht. L’antisémitisme existe depuis des siècles et on a toujours été incapables de l’éradiquer. J’ai pensé à Roby, le vieux copain de mon papa. Roby, quand il est revenu des camps, il a dit « Fini les conneries ». Il a converti toute sa famille au protestantisme et il a refusé de faire circoncire ses garçons. Il avait du montrer sa zigounette aux autorités françaises et ça lui avait valu un aller simple pour la Pologne. Il voulait pas de ça pour ses enfants. Ses ancêtres avaient été virés par Isabelle, les ancêtres de sa femme avaient fui les pogroms de Russie, lui s’était retrouvé dans une succursale d’Auschwitz. Ça commençait à bien faire. Qui peut lui jeter la pierre ? On le persécutait pour une étiquette, alors il a enlevé l’étiquette.

J’ai écouté le témoignage d’un môme. « Myriam, elle est décédée. Alors, on a allumé une bougie pour qu’elle revive ». Pauvre môme ! Sa copine, elle revivra jamais, elle se fera pas des tartines de Nutella et elle rigolera jamais avec ses copines en parlant du beau brun qui la fait frissonner quand il la regarde. C’est fini. Tu peux allumer des bougies tant que tu veux. Pourquoi on lui dit pas ça au môme ? Que la mort, c’est définitif. Ils veulent que ça continue, encore et encore ?

Idée n° 2 : le tueur, s’il avait été jugé pour haute trahison, il croupirait dans un cul de basse-fosse et rien n’aurait existé.

Parce que faut pas déconner. Le mec, Français, il va en Afghanistan et au Pakistan se battre avec les talibans contre l’armée française. Ça s’appelle désertion et haute trahison. Là aussi, tu peux tourner le truc dans tous les sens. Quand un citoyen d’un pays va aider l’armée ennemie, comment tu veux dire ? Ben, chez nous, c’est pas comme ça. Quand il revient de son engagement chez l’ennemi, on le fiche, on le surveille de loin. C’est tout. Je sais pas ce qu’on pense. Qu’il faut bien que jeunesse passe ? Que c’est bien d’avoir des valeurs à 20 ans ? Que c’était que du tourisme ?

C’est pas d’hier. Je me souviens d’un vieux commissaire de police de Bayonne qui se targuait de pouvoir décapiter l’ETA en quelques jours. « Il suffit de coffrer tous ceux qui ont fait un voyage en Libye ». A l’époque, Khadafi avait organisé des camps d’entraînement où passaient tous ceux qui voulaient apprendre le maniement d’explosifs. Y’avait pas que des Basques. Des Irlandais aussi, des Allemands de la RAF. Sauf que faire du tourisme en Libye, c’était pas un délit. Faut être con, tout de même….

Et puis le criminologue Alain Bauer affirme ce matin sur I-Télé qu’il y a en France environ 800 anciens combattants talibans et qu’on les connaît. 800 ennemis qui ont tiré sur des soldats français. Dreyfus, on l’a envoyé au bagne pour moins que ça… Alors, Sarko s’énerve. Il dit qu’on va faire des lois. Hé ! M’sieur Carla, les lois, elles existent. Suffit de réactiver les conseils de guerre.

Remarque Kouchner, il l’avait déjà dit que l’Afghanistan, c’était pas une guerre. On a des soldats qui flinguent et se font flinguer, mais c’est pas une guerre. On a des Français qui flinguent des soldats français, mais c’est pas des traitres. La vraie guerre, c’est à la sémantique qu’il faut la faire. Faut arrêter de jouer aux cons avec le politiquement correct. C’est ça qui fait couler le sang.

La dégradation sémantique est assez simple. Tous les stratèges, de Sun Tzu à Clausewitz recommandent de connaître l’adversaire. C’est assez logique. Après, tu glisses. Tu dis que pour connaître, faut comprendre. Et, plouf ! t’es mort. Parce que si tu comprends, tu risques d’approuver, de te dire que finalement, le mec, il a pas complètement tort. L’avocat de Merah, il te dit que c’était plutôt un gentil mec, rigolo et pas violent. T’as qu’à croire : quinze condamnations dont une pour vol avec violences, ça caractérise le bon copain rigolard qui frime avec une BMW qu’il conduit sans permis ! On peut vraiment dire n’importe quoi….. Y’a un mot pour ça : hors-la-loi. Un mot qu’on n’utilise jamais. Un mec qui conduit sans permis, c’est un hors-la-loi. Un immigré clandestin, c’est un hors-la-loi. Vu qu’un hors-la-loi, c’est un mec qui respecte pas la loi. Quelle que soit la loi. Faut le comprendre, l'avocat : à force de défendre des hors-la-loi, il trouve que la marginalité, c'est normal.

Seulement voilà : on joue avec les connotations. Pour tout le monde, un hors-la-loi, c’est un gros criminel, Mesrine ou Jessie James. Pas le mec qui conduit sans permis. Comme s’il y avait des petites lois et des grosses lois, des lois qu’on peut transgresser et des lois qu’on peut pas. Les deux vitesses de la loi.

C’est la vision du comptoir de bistro. Tous les mecs qui comprennent ou pas, qui décident et qui jugent les juges. Qui disent que c’est pas si grave. Faut se réveiller. On a des juges pour appliquer la loi et en décider. Le citoyen de base, c’est pas à lui d’en parler. Pas à lui de dire « si c’était moi… ». Ben justement, c’est pas toi. Ferme ta gueule. Si tu veux juger, deviens magistrat, ce sera ton boulot. Si t’es pas content, change de député, y’a que lui qui peut changer la loi. Pas toi. Commenter la justice, c’est simplement faire du bruit avec la bouche avant de dire au patron « Allez, Jojo, remets une tournée ».

Alors, on comprend. Le seul truc qu’on comprend pas, qu’on veut pas comprendre, c’est qu’un hors-la-loi se met de lui même hors la société qui est régie par ces lois. Le mec, faut le comprendre, il a été élevé par une maman seule, il a pas bien suivi à l’école, tous ces trucs. Ben oui, mais ça change pas la loi. Ou alors faut dire que la loi, tu t’en tamponnes. Et puis, la loi, elle lui a aussi permis d’avoir des aides sociales. Tu peux pas trier, les bonnes lois et les mauvaises. Faut tout prendre. Sauf à vouloir le beurre et l’argent du beurre. Mais ça, c’est pas possible…

On en reparlera….

2 commentaires:

  1. Mouais, mais deux remarques :

    - d'abord, si les enfants n'avaient pas été dans une école confessionnelle, ils seraient encore en vie. Certes. Et la personne morte dans un accident de la route n'aurait été morte si elle n'avait pas été sur cette route à ce moment-là. Je ne vois pas bien ce que ça prouve, si ce n'est que se revendiquer/être revendiqué comme juifs, c'est devenir une cible pour les antisémites. Seulement à mes yeux, le problème, c'est l'antisémitisme, pas le fait d'afficher son judaïsme. Donc l'idée logique mène à quoi ?

    - ensuite, celui ou celle condamné-e pour avoir voler de l'argent à l’État ou verser des pots de vin et des rétro-commissions, c'est aussi un-e hors-la-loi. Alors quand des hors-la-loi veulent durcir les lois sur les hors-la-loi qui n'appartiennent pas à la catégorie socio-culturelle qu'eux, j'appelle ça du foutage de gueule, et je me dis que le pays va mal. Parce que les hors-la-loi, ils ne se mettent pas tous hors de la société, ils ne sont pas tous des marginaux : certains sont dans les hautes sphères de notre société. Et pour cela, tu recommandes quoi ?

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    1. 1/ Bien sûr que le problème, c'est l'antisémitisme. Sauf qu'il existe depuis 20 siècles et qu'on n'a pas trouvé de solution. Et que "l'anti" se nourrit de ce qu'il combat. L'antiracisme, c'est combattre le racisme : s'il n'y a pas de racisme, il n'y a plus d'antiracisme. Et donc, exalter le sémitisme, c'est nourrir l'antisémitisme. En plus, c'est religieux....

      2/ Bien entendu que verser des pots de vin, c'est se mettre hors-la-loi. Et c'est se mettre en marge. D'ailleurs les "hautes sphères", comme tu dis, elles sont en marge, en haut mais en marge. La répression est sélective ? Il y a deux solutions :la gentille (le bulletin de vote) et la méchante (la révolution). Râler dans son coin ne change rien.

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